Scar, cet été, elle en voit, des choses. Des bouteilles hors de prix qui font de l'alcool un goût d'or, des fringues de luxe qui lui donnent des allures de mannequin, des lunettes de marque qui atténuent la pureté d'ses yeux bleus par une illusion d'prétention, des talons trop hauts desquels elle a appris à faire claquer au bon moment, un pas après l'autre, dignement. Poupée est revenue de Paris la luxuriance plein l'corps. Louve avec des billets verts plein les poches.
Quand Scar débarque sur l'pallier d'Esvir, son apparence n'a pas changé - ou presque. Un débardeur blanc ample rentré dans un short taille haute, cachant l'maillot d'bain qu'elle porte en-d'ssous. Des baskets neuves, une paire d'verres sur les yeux, la bouteille de tequila dans la main. Sauf que si on d'vait lui racheter ses vêtements maintenant, on en aurait pour des centaines d'dollars, payés à levis, nike & rayban. « ESVIR BOUGE TON BOULE, J'AI SOIF » s'impatiente la gamine, arborant un grand sourire en coin quand sa blonde vient lui ouvrir la porte. Elle lui tape la bise, comme si elles s'connaissaient depuis bien plus longtemps qu'un putain d'mois. D'toutes façons elle s'sont pas mal vues, avant l'départ de Scar pour Paris, elle est passée quelques fois au кактус. Puis maintenant, elles s'entendent bien. Genre vraiment bien, quitte à c'que Scar s'pointe à l'improviste d'vant sa porte. « Regarde c'que j'nous ai ramené de Paris ! » Elle brandit sa bouteille de tequila, où on peut clairement lire sur l'étiquette qu'la marque est mexicaine. « Bon c'est pas français, mais j'me suis dis qu'ça valait toujours mieux qu'un putain d'porte-clef en Tour Eiffel ! » ajoute-t-elle en haussant les épaules, salle gosse jusqu'au bout.

Esvir, n'a pas changé. A peine les filles s'retrouvent qu'elles se balancent des insultes à la gueule, avec pas mal de complicité quand-même. Quand la blonde demande à sa brune si on ne lui a jamais appris à dire bonjour, cette dernière hausse les épaules, pinçant ses lèvres dans une expression amusée. « Jamais » Elle est comme ça, Scar. A insulter les gens pour leur dire qu'elle les aime, et à s'pointer dans leur vie dans dire bonsoir ou au revoir. Mais elle s'rattrape vite, brandissant sa bouteille de tequila, tout sourire. Enfin, elle croit se rattraper. P a s   d u    t o u t ! La voilà dehors, sur l'palier d'la porte, la main vide d'une bouteille d'alcool et l'rire plein la bouche. « MAIS ESVIR LES PORTES-CLEFS C'EST INUTILE. M'DIS PAS QUE T'ES UNE PUTAIN D'TOURISTE QUI.. » La porte s'ouvre. Scar ferme sa bouche, puis rit à nouveau alors que l'hôte l'invite finalement à rentrer chez elle. « Ouais c'est ça ouais » lance-t-elle faussement vexée. Les amies rentrent ensemble chez la blonde, qui court presque jusqu'à la cuisine pour revenir toute pimpante, avec du sel et du citron coupé. « Pourquoi j'sens qu'on sera bourrées à seize heures ? » Normal. Tout à fait normal. Poupée n'se fait pas prier pour s'emparer du shooter, et trinque amicalement avec Esvir. « A ton porte clef ! » répète-t-elle, beaucoup trop amusée, avant de reprendre son sérieux pour avaler la tequila en deux secondes chrono. Quand Scar lève enfin les yeux d'son verre pour mater sa blonde, elle éclate de rire. Elle a un putain d'porte clef d'la tour eiffel. « Tu vois qu'j'ai bien fait d'pas t'en ramener un ! » rétorque-t-elle, le rire aux lèvres. De l'alcool, des rires et les voilà en pôle position pour passer une bonne après-midi entre copines. Scar, dans toute son aise, fait un tour de la pièce plutôt rapide. « C'est cool chez toi. » observe-t-elle dans un premier temps avant de regarder la blonde. « Même si ça ressemble à la maison d'un photographe millionnaire. » Heureusement, y'a des livres éparpillés un peu partout, deux trois fringues qui traînent, pour éviter la perfection. La brunette retourne auprès de son amie, s'asseyant à l'envers sur une chaise qu'elle tourne pour être face à Esv. « Quoi de neuf ma caille ? » demande-t-elle finalement, croquant encore dans son citron.

Esvir fait sa fausse vexée. Mais c'pas parce que Scar n'lui a pas ramené un porte-clef d'la tour Eiffel qu'elle n'a pas pensé à elle. Non, elle lui a ramené bien mieux qu'ça, une putain d'bouteille de tequila. Et la blonde finit par s'laisser convaincre par cette dose d'éthanol, d'avantage mexicaine que française, mais au goût intriguant qu'elles s'empressent toutes les deux de tester. Du sel, un quartier d'citron, un shooter rempli à ras bord, et les voilà parties pour une aprem tout en sagesse. « Y'a pas d'heure pour l'apéro ! » rit Scar alors qu'les filles ne se donnent qu'une vingtaine de minutes avant d'être sèches. « Roh, j'te ramènerai l'porte clef d'un autre monument quand j'partirai de nouveau, ce sera bien plus classe ! » Ouais, parce que Scar, elle y croit. Elle va repartir en voyage. C'était la première fois qu'elle quittait son pays, mais certainement pas la dernière. Elle est éprise d'un rêve d'ailleurs, depuis toujours, bien qu'ça ce soit accentué depuis Paris. Puis maintenant, y'a Elijah. Et Scar, elle a confiance en lui. En eux. En leurs putain d'idées en carton qui leur fait voler une bagnole, arnaquer une pompe à essence ou prendre un avion sur un coup d'tête. - - Après un bref tour d'pièce, l'oeil avisé, Scar fait remarquer qu'ça ressemble à un loft d'un photographe millionnaire. Quand Esvir répond, ça arrache un sourire soufflé à la brune. « J'te passe volontiers l'un des miens » fait-elle, en haussant les épaules. Son taff d'escort lui a fait rencontrer les plus riches de la ville, de l'état voire du pays. Et au fond, c'pas c'dont elle rêve. Enfin, elle en rêve. A temps partiels. Finalement, elle retourne une chaise pour s'y asseoir, continuant d'lécher la fin d'vie d'son citron et venant aux nouvelles de sa nouvelle amie. « T'as bien raison, c'trop bon le sucré salé » dit-elle, innocente, haussant ses épaules. « Moi ? Paris c'était vraiment.. vraiment cool. J'veux déjà y retourner. On a fait des hôtels de luxe, des maisons de haute couture, le moulin rouge.. et tu vois, ça n'avait pas du tout l'même parfum que quand j'fais ce genre d'activité avec mes clients. J'sais pas, c'était différent. J'avais l'impression que je découvrais un autre monde du luxe, pas celui que je connaissais, un sans faille, sans arrière pensée malsaine, sans arnaque, sans mensonge. Et c'était cool. Ouais, vraiment cool. » dit-elle, pensive et déjà presque nostalgique de cette semaine passée dans la ville lumière.

Esvir, c'est une des seules qui sait, pour l'escort, et tout ça. Ouais, apparemment, elles sont vraiment copines. Scar, elle n's'en est grave pas rendu compte mais elle tient à sa blonde. Spontanément, elles ont construit une amitié base confessions nocturnes ; et des rires, d'la folie, d'la sincérité et d'la complicité, respectivement, par étages. Et tout ça, sur l'Nil d'Austin. Elles sont un peu comme Isis et Cléopâtre, et leur sphinx à elle, c'un jacuzzi rempli à la tequila. Elles ont carrément défié l'temps et modernisé la légende égyptienne. Mais peu importe. Parce qu'elles n'sont pas momifiées, elles. Nan. Au contraire, elles sont pleines de vie. Et t'façons, c'c'qu'il lui fallait comme amie, à Scar. Un p'tit soleil, une lumière aussi belle qu'Esvir.
D'ailleurs, quand la blonde lui pose une question sur ses clients, elle n'prend pas ça comme un jugement du tout. « Nan t'es folle, j'traîne pas qu'avec des retraités. » rétorque la brune en riant. « Y'en a d'tous les âges. Enfin, les vingtenaires s'font trop peu nombreux. Mais R.A.S, pas d'bombe atomique dans l'game. » qu'elle fait, faussement triste, une moue légère au visage. En soit, elle s'en tape pas mal le coquillard, Scar, d'la gueule d'ses clients. Tant qu'elle est payée. Elle sait pertinemment qu'elle n'en reverra aucun, ils sont loin d'ressembler à ses fantasmes. Entre quinze mots et deux phrases, elles reprennent ensemble des shooters. Ouais, faut bien humecter ses lèvres. A force d'parler, y'a plus d'salive hein. On en fait comme on peut. C'pas comme si l'eau leur donnait envie en même temps. La blonde renchérit sur le sucré salé, c'qui fait rire Scar. Saucisson nutella ? Elle s'rait capable de tester, la conne. Juste pour dire qu'elle a eu les couilles de l'faire !
Prise d'une envie d'fumer, l'étudiante raconte son voyage à Paris tout en s'roulant une clope, puis se place debout devant la baie vitrée ouverte sur l'extérieur. Elle allume sa feuille, tirant et crachant la fumée vers le jardin. « J'suis partie avec Elijah. Un coeur d'gangster sous une gueule de gosse. Tu vois l'genre ? » répond-t-elle avec un sourire en coin sans se douter qu'ils puissent se connaître. « T'as voyagé, toi ? Où ça ? » s'intéresse-t-elle alors, avide de rêves, de souvenirs aériens.

Des vieux gougats. C'c'qu'ils sont, c'est vrai. Et malgré tout, Scar, quand elle entend ça, bah ça lui fout quand même un p'tit coup dans la poitrine. C'pas blessant, elle n'saigne pas du cœur, mais ça la touche. Ouais, p'têtre un petit peu plus que c'qu'elle n'l'avoue même. Parce que, quand elle y réfléchir, l'escort, bah elle elle s'sent sale, parfois. Sale d'se laisser caresser par ses clients, sale d'vendre son apparence pour un chèque et sale d'trahir ses.. peu importe. Elle n'est même pas sûre d'être encore vivante l'jour où elle ouvrira les yeux et qu'elle aura enfin l'courage de s'dire qu'elle aura été conne, à c'moment là d'sa vie. Alors, ouais, peu importe. Elle n'a pas l'temps d'regretter, Scar. Puis, son salaire, il est impressionnant. Et quand tu viens des p'tites impasses, c'est cool d'apprendre à marcher sur les grandes avenues. Mais t'casse quand-même pas la gueule, poupée. « T'sais, j'choisis pas le programme. Enfin, j'pourrais, mais ils retireraient ça sur mon chèque. Et puis, j'm'en tape pas mal, de c'qu'on va faire. Un dîner aux chandelles, un bal de famille, un meeting important, une inauguration, tout ça, finalement c'est pareil. J'dois être la même personne, la leur. C'qui m'emmerde, c'est d'les laisser m'toucher l'visage et les hanches. Mais bon, c'pas comme si j'couchais avec eux non plus, j'ai pas à m'plaindre. » qu'elle explique, l'visage plus sage, l'air plus sérieux qu'habitude. Parce que même si elle hausse les épaules à la fin, sur un air de je-m'en-foutisme indissociable à son image, ça s'voit, ça s'sent sur l'ton qu'elle a employé, sur la façon dont elle en a parlé. Elle est souillée, Scar. Mais elle n'laissera personne lui demander d'changer. Comme en guise d'réconfort, elles se resservent un shooter de tequila, ils ont encore l'goût amer mais l'sucre n'devait pas tarder à s'incruster dans leurs illusions d'nanas bourrées. « Putain j'savais pas que t'étais une daronne » taquine la môme, l'sourire enfin retrouvé « 20 » ajoute-t-elle, d'ses yeux amusés.
Une clope à la bouche, elle se plante devant la baie vitrée pour allumer sa tige et la tuer dans les cinq minutes qui suivent. « Tu l'connais ? » qu'elle demande, dans un hochement d'tête, les sourcils tirés. Par contre son meilleur pote, encore jamais entendu parler. Enfin, si, mais ça, elle n'le sait pas, Scar. Qu'le mec a qui elle a niqué l'braquage un soir d'printemps, c'était l'crush d'Esvir, et l'meilleur pote d'Elijah. Mais parler d'mecs, c'est peut-être à éviter, elles sont encore trop sobres pour s'risquer au sujet. Les voyages, c'est moins prise de tête et ça donne tout d'suite plus envie ! « Ah ouais ! » s'émerveille-t-elle quand la russe lui énumère ses périples. Scar écrase son mégot au moment où Esvir lui propose d'remettre une tournée, mais dans le jacuzzi ! Elle accepte volontiers l'invitation, un sourire trop grand d'étiré sur ses lèvres encore salées. Elle suit la blonde jusqu'à l'endroit-dit, et n'contient pas la première réflexion qu'elle s'fait en voyant l'engin. « Wow » Et sur l'instant, elle se déshabille, laisse ses fringues tomber sur la pelouse pour rentrer dans le bain en maillot de bain. L'coup était déjà prévu, c'jacuzzi, elle en rêve depuis leur première rencontre. « En tout cas, si tu retournes en Russie, t'auras intérêt à m'ramener une bouteille de vodka ! » rit-elle sans trop plaisanter, lui tendant son shooter vide avec enthousiasme, pour qu'elles puissent trinquer encore - et encore, jusqu'à c'qu'elles oublient tous les problèmes qui leur parcourent la vie.

La vérité, c'est qu'entre les âmes, il n'y a pas d'âge. C'est bien souvent c'qui dérange les cœurs, d'ailleurs. Mais, humainement parlant, on n'choisit pas d'apprécier quelqu'un pour la valeur d'sa vie ou l'temps qu'il a déjà passé sur Terre. C'est plus qu'ça. C'est d'la spiritualité, d'la compatibilité entre deux têtes, deux cerveaux capables d'être assez intelligents pour s'dire qu'les chiffres n'existent pas, et qu'l'amour n'est pas restreint. Scar, c'est une gamine paumée, d'vingt ans à peine, qui passe son temps à découvrir et repousser ses limites toujours plus loin. Esvir, elle a sûrement déjà tout compris - ou du moins, toujours plus qu'sa brune, elle a sûrement déjà aussi appris sur elle et sur les autres, trouvé ses limites. Parce qu'entre une môme de vingt ans et une femme de vingt-sept, l'vécu est différent, la façon d'vivre s'tord aussi. Mais ça reste quelque chose d'personnel. Et ça n'influence pas leurs affinités. Parce que Scar, c'est la première fois qu'elle s'trouve une copine. Elle est chouette, Esv. Puis, elle a les pieds sur Terre. Et Scar, même si elle n'y pense pas encore, elle a peut-être enfin trouvé une parcelle d'réalité à laquelle se rattacher quand elle vole un peu trop haut dans l'chaos d'ses rêves animés.
Comme prévu, elles s'retrouvent toutes les deux en maillot d'bain dans l'jacuzzi - bien entourées d'leur bouteille de tequila et des indispensables qu'il en découle pour s'bourrer à la teqpaf. Installées l'une à côté d'l'autre, Scar s'sent apaisée dans c'moment de tranquillité. C'est pas un cliché, les bulles lui qui remuent dans l'bain adoucissent son corps d'habitude si énergique. « J'ai qu'un tatouage. Il est tout récent, j'l'ai fais l'dernier jour d'mon voyage à Paris. » répond-t-elle lorsque sa blonde lui demande si elle n'est pas tatouée. C'est vrai, qu'elle, est pleine de couleur sur la moitié d'son corps au moins - c'est tellement joli, Scar admire un instant - elle, qui n'a qu'un corps rayé d'cicatrices. « Regarde » Elle se tourne légèrement pour faire dos à Esvir, relevant ses longs cheveux pour les nouer dans un chignon grossièrement négligé, découvrant l'symbole d'encré dans sa nuque. Elle se replace ensuite, alors qu'deux nouveaux shooters se préparent pas loin d'leurs bouches envieuses d'liquide divin. Scar, elle défie quiconque d'la coucher à la tequila, par contre, la vodka, c'est une autre histoire.. « Franchement, ce s'ra à essayer ! Mais j'te garantis pas de n'pas t'obliger à appeler le SAMU à la fin. » rit-elle face à la proposition d'la russe. Elles trinquent et s'enfilent un nouveau shooter qui enclenche en douceur l'processus vers l'ébriété. La blonde finit par s'poser des questions sur l'intérêt qu'porte Scar aux garçons - qui hausse naturellement les épaules, s'mordant la lèvre inférieure pour dissimuler un rire refoulé. « J'sais pas trop. J'suis pas du genre à revoir quelqu'un après m'l'être tapé tu sais. J'ai du mal avec tous ces trucs d'amour, les rendez-vous, les retrouvailles l'soir après le taff et une partie d'jambes en l'air entre deux repas. Franchement, ça m'fait pas rêver. » commence-t-elle. Mais.. « Mais tu l'connais d'où, Elijah ? » qu'elle demande, curieuse. Parce que c'est lui qui lui vient en tête après sa question, inconsciemment. La brune, plongeant son regard pétillant dans celui d'sa blonde, remue l'eau du bout d'ses doigts. « Et toi ? T'as quelqu'un dans ta vie ? » La dernière fois, elles étaient rentrées avec des musicos qui avaient joué au bar, c'qui laissait présumer qu'elles étaient toutes les deux libres de tout.

C'tatouage c'est un bout d'encre sur un coup d'tête gravé sur la nuque. C'sont les contours de l'état du Nevada, dessinés à l'arrache, vivant à jamais. L'aiguille a creusé un souvenir que Scar n'a jamais oublié, celui d'son père. A Paris, elle l'a rendu immortel. Caché sous ses cheveux, personne n'le voit, même pas elle. Elle l'sait juste - qu'il est là. Puis maintenant, elle voyagera partout avec lui. Même s'il a sûrement déjà oublié qu'elle existait, sa fille. L'fruit du dernier coup d'rein qu'il a foutu à sa femme, l'bébé crée d'ses putains d'pulsions qu'il n'a jamais su contrôler, l'enfant produit d'ses hormones, d'sa chair, d'son sang, d'sa qualité d'homme. « Merci. » répond la môme dans une moitié d'sourire. Esvir est l'une des seules à avoir vu son tatouage, avec Elijah, et pour Scar, c'est un vrai symbole de confiance. Heureusement, elle n'pose pas d'question et l'moment devient plus léger quand elles trinquent une nouvelle fois. Elles échangent une poignée d'rire et ça va mieux. Parce qu'avec sa blonde, la vie d'vient plus facile.
Esvir s'laisse aller à la confidence, et Scar l'écoute tout en allumant une cigarette sous l'influence de la sienne. Elle tire une première latte, recrache, fronce les sourcils à l'entendre lui parler d'cet homme qui n'hésitait pas à lever l'poing contre elle. Ça la révolte, Scar. « Putain » elle lance, spontanément, touchée, alors qu'la blonde continue de lui partager ses secrets. « T'es une femme forte, Esv. » C'sont les seuls mots qu'elle prononce, à la fois admirative et pleine de colère envers Cole - c'bâtard de chien d'la casse. « Je n'laisserai personne m'toucher. » qu'elle ajoute, les sourcils toujours froissés. Les filles ne s'accordent pas sur la vision du couple, mais au moins un point commun les rassemble : elles n'ont jamais connue d'histoire d'amour à l'eau d'rose. L'genre de truc qui rend bête. « T'sais, j'sais pas. Tu m'prends pour une folle si j'te dis que justement, c'qui m'plaît à moi, c'est la brutalité, l'éphémère, l'adrénaline, l'intensité ? J'veux pas d'une même personne toute ma vie, l'âme-soeur pour moi, ça n'existe pas. J'veux juste rencontrer des gens, les uns après les autres, les foutre chacun leur tour dans un chapitre d'ma vie, et tourner la page avant qu'ils inspirent une nouvelle histoire. » Scar, elle finit toujours par fuir, faut l'savoir. Elle finit toujours par laisser derrière elle des coeurs qui l'aime, et même si elle les aimera elle aussi toute sa vie, elle refuse d'les voir continuer à battre ensemble. Sa façon d'aimer, elle est incompréhensible. Mais dans l'fond, tellement influençable. Elijah, par exemple, elle l'aime bien. Il est cool. « J'aurais voulu voir ça » rit la brune quand Esvir lui explique d'où elle connaît Elijah. Cette soirée devait être un sacré bordel. Elle mentionne l'nom d'Aksel. Sûrement celui d'qui elle parle après. L'mec dans sa vie. « Ouais j'vois. Tu m'diras si vous finissez par vous marier ou vous entre tuer. » taquine l'étudiante dans un regard pétillant. Continuant d'consumer sa clope, elle prend l'temps d'cracher la fumée, en souriant en coin, en entendant la question d'Esvir. « On dormait ensemble, à l'hôtel. Mais il est tellement sage c'garçon, puis j'crois qu'il est piqué surtout. Il n'a pas arrêté d'chercher des cadeaux pour une femme, il m'demandait mon avis sur des robes, des parfums. A mon avis, il préfère les princesse, enfin, surtout une, j'crois. » confie Scar, en haussant les épaules - l'air indifférent. Tant pis.

Cette promesse de n'laisser personne les toucher, elle a l'goût d'la tequila et l'sentiment de protection. C'est un shooter d'plus qui vient allonger leur liste d'apéro. Scar commence à se désinhiber, d'plus en plus, elle ouvre son cœur presque autant qu'sa bouche. Les confidences poussées par l'éthanol rendent la conversation plus facile, les secrets moins gardés. Vu comme c'est parti, elle n's'en souviendront peut-être pas demain, mais putain c'que ça fait du bien. Scar, dans c'bain, elle lâche prise. Sa tête d'tombée en arrière, elle rit en s'amusant à faire danser l'eau sous ses doigts, l'air léger. Les mots s'assemblent pas toujours bien ensemble mais l'moment s'fait d'plus en plus précieux, parce qu'là, elle est heureuse. Sa blonde, puis une bouteille de tequila. L'trio parfait pour passer la meilleure des journées.
Elle acquiesce quand Esvir s'improvise poète. On finit tous par s'lasser. Tout l'temps. Mais la blonde semble bien partie pour être tombée love d'un voyou. C'mec dont elle lui parle, présent à la soirée où elle a rencontré Elijah. Scar aurait aimé être là, pour sauter à pieds joints avec Eli sur la télévision cassée, dessiner tout plein d'symboles à la con sur l'plâtre d'Aksel et faire une partie de ouija avec Esv pour maintenir ses démons loin d'elle. « Putain, ça d'vait être quelque chose. » qu'elle fait, entre deux rires, écoutant attentivement la blonde lui raconter la soirée. Et ça entraîne vite les confidences sentimentales, elle a l'air de vraiment bien l'kiffer, son bad boy. « Fais juste attention à c'qu'il n'te retourne pas le cerveau bébé. J'espère qu'ce mec est conscient d'la fille qu'il peut potentiellement avoir dans sa vie. » elle fait, l'air presque protecteur, pourtant dit sur un ton neutre. Il s'réveille un instinct amical en Scar, genre, un truc qu'il n'lui est que rarement arrivé. Elle aime bien Esv', au point d'se préoccuper d'elle et de penser à c'qu'on n'lui fasse pas d'mal. Surtout si ça n'vient pas d'elle.
Et d'son côté à elle, c'est Elijah ? Non, impossible. Scar n'a pas l'temps pour ces conneries. « Ouais, j'pense. Mais il fait c'qu'il veut, j'm'en tape. » Menteuse. Elle hausse les épaules, l'air anodin. Putain qu'est-ce-qu'il fout dans sa tête celui là aussi. Elle n'devrait pas penser à lui, encore moins maintenant. « Nan, rien. Enfin, j'me tape des mecs, mais rien d'plus. » Un classique. Baiser, fuir. « P'tain ce jacuzzi, c'est l'extase. » elle fait, dans un soupir de bien-être. Elle qui n'a toujours connu qu'les douches à l'eau froide parce que le ballon d'eau chaude avait eu l'temps d'exploser avec l'temps que sa mère prenait pour s'laver. Connasse.