Charlie, elle avait bossé toute la matinée au salon de tatouage pour remplacer une collègue malade. Et ça l’avait fait grave chier. Faut dire qu’elle avait prévu de partir à l’aube sur les routes avec Numéro 16 pour s’entrainer dans le dessert du Texas, sur ces vieilles routes qui la font vibrer. Elle avait prévu de rentrer un peu après le crépuscule, ça faisait bien trop longtemps que Numéro 16 réclamait la vitesse et la précision et Charlie devenait de plus en plus tendue à respecter les limitations de vitesse dans la vie d’Austin. L’adrénaline et ces moments à la conquête de la liberté avec sa voiture lui manquaient. Elle se rendait compte que sa voiture n’était pas idéale pour rouler en ville mais c’était la seule qu’elle avait. Elles avaient tellement traversé d’épreuves et tellement voyagé ensemble qu’elle avait du mal à imaginer la tromper avec une petite voiture banale comme les autres citoyens. Elle ne voulait pas être infidèle à Numéro 16 la brune.  Cependant, elle devait se rendre à l’évidence, Numéro 16 souffrait du nouveau mode de vie de sa propriétaire. La tête sous le capot, Charlie ne comprenait pas d’où venait le problème. Elles n’étaient parties que depuis quelques heures, rien d’inhabituel mais la Chevrolet se faisait capricieuse. Elle avait tout vérifié mais Charlie restait pantoise : d’où venait ce bruit étrange qui résonnait lorsqu’elle poussait sur l’embrayage ? La station Exxon était complètement déserte et la petite supérette devait être fermée depuis bien longtemps, laissée à l’abandon. Charlie refusait de laisser Numéro 16 dans cet état mais surtout, son égo refusait de repartir tant qu’elle n’avait pas trouvé l’origine du problème. Charlie relativisa lorsqu’elle entendit un moteur gronder s’engager près des pompes pour refaire vidange. Elle leva les yeux au ciel, le propriétaire de cette voiture ne devait pas s’y connaître pour conduire un tas de tôle pareil. Elle était définitivement seule et Numéro 16 ne semblait pas bouger la moindre vitesse pour lui donner un coup de main. Elle avait dû cambouis plein les mains, elle n’hésita pas à s’essuyer sur son short en jeans pour éviter que ses doigts glissent dans le ventre de la bête. L’autre repart, elle pouvait pas le rater, il faisait un bruit à réveiller les morts mais il s’arrête à sa hauteur et sort de la voiture. Charlie le regarde, et hausse un sourcil. Il voulait l’aider. La bonne blague ! Elle le reluqua de haut en bas et ne put s’empêcher de se dire qu’il devait être du genre macho. Les mecs, ils sont comme ça de toute façon, dès qu’une fille s’intéresse à la mécanique, c’est d’office pour se donner un genre. D’un geste de la main elle le rembarre : « Tu dis ça parce que je suis une fille ? » Elle avait le ton sec la brune. Elle avait toujours eu du mal à ce que quelqu’un d’autre touche à son bébé, c’était toute sa vie. Elle avait été sa maison pendant deux ans. Une relation particulière étaient né entre-elle et Numéro 16 depuis qu’elle l’avait volé à son ex petit-ami, un vieux professeur d’auto-école. Charlie se montre un peu plus docile, elle avait besoin d’aide et ça lui bouffait le ventre de l’avouer, mais elle avait besoin d’un professionnel, pas n’importe qui « Si t’es pas mécano ou un truc du genre, passe ton chemin, personne n’y touche à part des mains professionnelles » elle est plus docile, mais son agressivité ne disparaît pas vraiment. Elle peut être vraiment chiante avec ses principes Charlie.

Charlie était perplexe, allait-elle faire confiance à ce type qui avait surgit de nulle part ? Le destin devait sans doute être de son côté quand il commença à parler de moteurs. Bon pour lui, de plus, il ne semblait pas être vexé de la façon de parler de Charlie, il était plutôt calme et sympathique ce qui fit redescendre l’agressivité de la brune. Même si il avait réussi à lui faire baisser sa garde, elle ne le lâcherait pas d’une semelle. Elle ne voulait pas perdre une miette de ce qu’il allait faire à Numéro 16 s’il acceptait de l’aider. Elle apprécie cette manière qu’il a de dire les choses clairement.

« Non ça va, reste Sonny » Elle hausse les épaules et se repenche sur son moteur « Lorsque j’actionne l’embrayage, y’a un bruit étrange, comme un roulement et je ne parviens pas à trouver d’où il peut provenir. Je pense que c’est un problème de disque mais je n’ai pas les outils nécessaires sous la main pour vérifier. »

Elle n’avait pas envie de prendre le risque de redémarrer. Elle avait pris la première sortie et s’était arrêtée ici, à Exxon, un endroit paumé. Elle attendait donc un miracle, peut-être que c’était lui finalement. « Je m’appelle Charlie. Je te serrerais bien la main, mais j’suis sale. » De manière générale, elle n’aurait pas lésiné mais elle avait besoin de lui et si pour cela elle devait se faire passer pour un agneau poli, elle le ferait. L’agressivité envolée, elle sourit à Sonny. Il a un prénom de personnage de jeu vidéo, ça la fait marrer. « Tu t’appelles vraiment comme ça ? ». Elle a les yeux remplis de malice Charlie, elle veut pas froisser les gens mais bien souvent, elle ne mettait pas la forme pour poser ses questions indiscrètes.

Miracle ! Il a des outils. Charlie sautille et trépigne d’impatience. Elle pourra réparer le problème et repartir sur les routes. Il part vers sa voiture tout en me répondant le plus sérieusement du monde. Il a l’air de manquer de folie, ce gars-là. Charlie elle trouve ça suspect. Dans les films, les mecs calmes et plutôt introvertis, c’est des tueurs en série. Peut-être que c’était son objectif, peut-être qu’il faisait ça comme occupation : venir en aide aux gens dans des stations-services abandonnées. Après sa mésaventure dans la maison hantée, elle allait finir dans un asile si elle survivait à ce type. Et puis, ce n’est pas un moche gars, il est même charismatique : qu’est-ce qu’il n’allait pas chez lui ? Il allait peut-être l’assommer avec une clé à molette puis la torturer à l’aide d’un tournevis et une scie bien aiguisée. Elle aurait dû aller à l’église faire ses heures d’intérêt général, tout ça ne serait pas arrivé. Charlie recule lorsqu’il revient. Elle plisse les yeux et tente de déchiffrer quelque chose d’anormal dans son comportement. Il attrape le cric, elle se raidi la gazelle à cause de ce qu’il pourrait lui faire, mais aussi à ce qu’il pourrait faire à sa voiture. Elle sert les dents, mais elle doit bien se rendre à l’évidence qu’il sait ce qu’il fait. Il essaie peut-être de la mettre en confiance pour mieux la frapper par ensuite ?

« Oui, oui, pas de problèmes »

Elle n’écoute pas vraiment ce qu’il dit, elle l’observe, c’est plus fort qu’elle. Son imagination débordante lui joue des tours, c’est évident. Soudain, il disparaît sous la voiture. Charlie revient à elle et glisse sous la carrosserie après qu’il l’a appelle. Elle se couche à côté de lui et regarde chaque geste qu’il pose sous la bête. Ses gestes sont précis. Il a une certaine dextérité. Si Nate était là, il saurait quoi faire, il l’aurait déjà mis en pièce ce type. Mais Charlie elle a pas sa langue dans sa poche, alors elle réponds :

« Si t’es pas un tueur en série, je pourrais éventuellement rester avec toi, mais t’as l’air vachement suspect quand même »

Charlie, elle pourrait signer son arrêt de mort sans s’en rendre compte. Heureusement qu’il n’est pas celui qu’elle pense qu’il soit.

Couchée sous la voiture, Charlie observait Sonny avait attention. Elle le jaugeait, et tenait de décrypter le moindre mouvement suspect. Elle devait cependant se rendre à l’évidence, qu’il était juste très absorbé par le problème de Numéro 16 et qu’il n’avait rien avoir avec un tueur en série. Et il avait raison, avant tout il fallait réparer sa voiture pour éviter de faire pire que bien. Il semblait vraiment savoir ce qu’il faisait et Charlie reconnu enfin qu’il était ce coup du destin.

« Yep t’as raison, merci en tout cas » Charlie elle détourne le regard car dire merci, ce sont des mots qu’elle va chercher loin dans l’fond de sa gorge. Elle n’aime pas trop ça dire merci parce qu’elle a jamais pu que compter que sur elle. Elle écoute attentivement ses conseils avant de grimper dans la voiture après être sortie de sous son ventre. Charlie allume le moteur et démarre tranquillement en prenant soin d’être la plus délicate du monde en actionnant la deuxième. Le bruit est toujours là mais Charlie doit tendre l’oreille pour le percevoir, c’est bien mieux mais elle n’allait pas tarder à emmener Numéro 16 au Garage pour changer la commande de l’embrayage.

Arrivée à la hauteur de Sonny, elle ouvre la fenêtre : « Ça va mieux, j’irais l’apporter demain pour commander la pièce. Elle met ses coudes sur le bord de la voiture avant de susurrer : « Et du coup… tu fais quoi pour t’éclater, toi ? » Le problème de Numéro 16 réglé, Charlie retrouve sa témérité et son côté aguicheur habituel, t’façon, c’était pas un sérial Killer, qu’avait-elle à craindre ?

Charlie éclata de rire à la réponse du brun. Faut dire qu’elle ne s’attendait pas à cette réponse et pourtant, ça l’intéressait. Il aimait se balader en voiture mais ce qu’elle préférait elle c’était l’adrénaline et la vitesse. Les courses, c’était son truc, son gagne plain en plus du salon de tatouage, Sa passion depuis quelques années. Peut-être qu’il serait son compagnon d’route, celui qui l’accompagnerait pour des virées.
« Okay, quand Numéro 16 ira mieux, on ira s’balader »
Elle avance son bras vers la boite à gants, l’ouvre et attrape son paquet de clopes et s’en grille une. Elle tend le paquet à Sonny « T’en veux une ? » Elle lui devait bien ça. Au fond, il n’avait rien d’un sérial Killer. Il était gentil et un peu simplet. Comme s’il avait fait exprès de ne pas avoir compris ce qu’elle voulait dire.
« Je voulais dire, Tu fais quoi pour t’éclater quand une fille et toi êtes sur une aire d’autoroute déserte ? »
Au pire, elle pourrait lui faire un dessin, parfois les hommes et la subtilité ça ne colle pas vraiment, c’est comme les talons aiguilles et la pédale d’embrayage ou de freins. Ça fait boum : incompatibilité.

Elle tire sur sa clope et se demande ce qu’elle pourrait faire de sa journée. Il ne voulait pas fumer, il ne voulait pas s’envoyer en l’air, il voulait quoi ? Jouer au scrabble ? La fumée encercle son visage avant de disparaître. Avec Numéro 16 hors d’usage, ses possibilités étaient restreintes. Elle n’allait tout de même pas aller à l’église prester des heures alors qu’elle avait congé. Et puis, de toute façon, elle n’avait pas envie de voir Andria. Cet inconnu, il avait été bien sympa de l’aider, mais il était d’un ennui mortel. Elle pose sa tête sur sa main et lâche :

« T’as pas l’air d’être le genre de gars qui met du piment dans sa vie hein ? »

Il avait l’air d’un type droit dans ses bottes, le genre de fils à papa version mécanicien. Celui qui respectait les règles. Charlie tire une bouffée, elle allait bientôt reprendre la route pour aller au garage :
« C’est quoi l’truc le plus fou que t’ai fait dans ta vie ? Genre le truc de Ouf, quoi ! »

Charlie elle écoute attentivement ce que Sonny lui raconte. Elle avait envie d’entendre une histoire folle, une histoire drôle comme elle peut en raconter des milliers mais Sonny et elles étaient complètement différents. Elle, elle pouvait raconter des histoires à dormir debout, des histoires de courses de caddie dans les magasins, des histoires sur l’inconscience de la jeunesse, des histoires de blagues à faires dans un parc, des histoires à se faire embarquer par les flics pour le reste de sa vie bien qu’elle n’ait jamais tué personne pour le moment. Lui, il ne faisait parler que de voitures et il était bien plus accro que Charlie elle-même, elle le trouvait même ennuyant ce garçon. Ce n’était pas sa faute, c’était elle qui avait l’habitude de vivre à 500 à l’heure, à s’prendre des délires à fond, à vivre la vie comme si elle allait crever demain.
Charlie elle jette son mégot d’une pichenette par la fenêtre et lance « Bon, j’me casse. Encore merci pour le coup d’main ! » Elle allume moteur qui gronde instantanément « Faut que j’aille prendre soin de Numéro 16 ! Allais à la prochaine fois ! » Elle pousse sur l’embrayage et démarre. Elle prend de la vitesse et lance un « Tchuuuuuuuuuuuuuuuus ! » et disparaît dans un nuage de fumée.

HJ : Soit on cloture là ou soit tu refais une réponse, c'est comme tu préfères :)